Dans leur dernier Communiqué en date du 22 avril 2020, le CRAAD-OI et le Collectif TANY avaient dénoncé une énième entorse à la suspension des activités de communication du projet Base Toliara décrétée par le Conseil des Ministres en novembre 2019, à l’occasion de la grande campagne de communication autour de l’octroi de dons divers d’une valeur considérable par les promoteurs de ce projet à l’endroit du Centre de commandement opérationnel (CCO) COVID-19 de Toliara.
En raison du silence assourdissant des autorités compétentes face au mépris des promoteurs de ce projet minier à l’égard des décisions étatiques, les auteurs du Communiqué avait notamment appelé à la vigilance et à la plus grande prudence pour s’assurer que ces contributions largement médiatisées du projet Base Toliara n’occultent des tentatives d’influence, et que la crise du COVID-19 ne serve pas de prétexte pour continuer à passer outre les décisions étatiques au détriment des droits des communautés locales concernées. D’après les échos médiatiques de la rencontre du 11 mai 2020 entre le Ministre des Mines et des Ressources Stratégiques et les opérateurs des grandes mines, ce cri d’alarme s’avère amplement justifié.
En effet, au cours de cette réunion visant à « identifier ensemble les contributions de tout un chacun pour assurer la relance des activités de ce secteur qualifié de stratégique, pendant et après cette crise sanitaire qui sévit dans le pays »(1) , leur soutien à la lutte contre le COVID-19 a été l’un des principaux arguments avancés par les promoteurs du projet Base Toliara pour que l’Etat Malagasy le laisse reprendre ses activités.
D’une manière générale, les opérateurs des grandes mines mettent à profit le processus de concertation sur la situation socio-économique et l’après-COVID-19 pour se positionner comme étant les fers de lance de la stratégie de relance économique, notamment grâce aux moyens financiers dont ils disposent, à la différence des autres secteurs. Outre les promoteurs de Base Toliara qui persistent à ignorer l’opposition farouche de la majorité des communautés affectées à la réalisation de leur projet minier, la société Ambatovy fait fi du fait que son site a été mis en quarantaine car il est à l’origine de nombreux cas de contamination par le COVID19.
Nous avons bien noté que le Ministre des Mines et des Ressources Stratégiques a souligné que la levée du gel des permis miniers réclamée par les opérateurs miniers ne se fera pas à tout va, et que la mise en place d’un cadre légal qui soit à la fois incitatif et bénéfique pour le pays(2) est le défi à relever par le Gouvernement. Cependant, les signataires de ce Communiqué déplorent l’exclusion de la société civile – en tant que représentante des communautés concernées – de ce processus de consultation sur la stratégie de relance du secteur minier, ainsi que l’absence de réponse de la part des responsables ministériels à ses demandes répétées au sujet de la reprise du processus de la révision du Code Minier qui avait été interrompu par les mesures de confinement liées à la pandémie du COVID-19.
Les signataires de ce Communiqué réitèrent leur appel urgent au Gouvernement :
- à prendre en compte dans ses délibérations sur la stratégie de relance économique en général, les liens directs entre les projets miniers à grande empreinte écologique comme Base Toliara et les crises climatique et écologique traversées par Madagascar, et la vulnérabilité croissante aux crises sanitaires qui en résulte pour les communautés concernées ;
- à se rappeler le danger mortel que la réalisation effective du projet Base Toliara représenterait pour les populations riveraines, en raison de la radioactivité qu’il est susceptible de générer, comme nous l’avions signalé dans plusieurs Communiqués ;
- à écouter la voix du mouvement populaire d’opposition au projet Base Toliara qui n’a cessé d’appeler les autorités étatiques à arrêter les activités de ce projet minier australien qui menace leur santé, leurs droits fondamentaux et leur patrimoine naturel ;
- à procéder à la mise en place d’un cadre de gouvernance des projets miniers et agro-industriels à grande échelle qui soit réellement respectueux des droits humains, des intérêts nationaux et du développement durable à Madagascar.
Antananarivo le 13 mai 2020
CRAAD-OI : Centre de Recherches et d’Appui pour les Alternatives de Développement Océan Indien craad.madagascar@gmail.com ; http://craadoi-mada.com
Collectif pour la défense des terres malgaches – TANY patrimoine.malgache@yahoo.fr ; http://terresmalgaches.info, www.facebook.com/TANYterresmalgaches
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(1) Midi Madagasikara du 13 mai 2020
(2) L’Express du 13 mai 2020