Madagascar est l’un des pays contribuant le moins à la crise climatique ; pourtant, il est le quatrième pays le plus affecté par ce fléau, à en croire l’Indice mondial des risques climatiques 2020. Ce pays est également une zone sensible en matière de biodiversité.
Depuis sa création en 2012, le Centre de recherche et d’appui pour les alternatives de développement – Océan Indien (CRAAD-OI), basé à Antananarivo, œuvre à la promotion d’alternatives de développement durable centrées sur la promotion et la protection des droits humains des populations les plus vulnérables aux changements climatiques, à l’exploitation des terres rares et aux projets agro-industriels à Madagascar.
« Madagascar possède un écosystème très précieux et sensible, mais il est gravement menacé par les changements climatiques. Avec des émissions de dioxyde de carbone de près de 0,1 tonne par habitant, c’est l’un des pays qui contribue le moins à la crise climatique », a déclaré Volahery Andriamanantenasoa, responsable de programme pour le CRAAD-OI. « Aujourd’hui, plus de 1 800 espèces endémiques sont menacées d’extinction, selon la liste rouge 2020 des espèces menacées de l’Union internationale pour la conservation de la nature, dont 80 % des espèces végétales et animales endémiques du pays. »
En préparation de la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP26), le HCDH s’est associé en septembre 2021 avec le CRAAD-OI pour organiser le premier Forum public sur la justice climatique et les droits de l’homme à Madagascar. Ce Forum a accueilli plus de 100 représentants de communautés locales affectées par les changements climatiques à travers le pays, ainsi que d’organisations de femmes et de jeunes et du Ministère de l’environnement et du développement durable.
Volahery Andriamanantenasoa a fait remarquer que la plupart des organisations de la société civile dans le domaine de l’environnement dans son pays se concentraient sur la responsabilité individuelle, mais qu’un mouvement de la jeunesse national émergent avait commencé à faire évoluer le discours vers la justice climatique. Madagascar a été frappée par plusieurs catastrophes naturelles, la sécheresse et la famine dans le sud, ces phénomènes ayant poussé les populations à migrer vers le nord pour trouver des terres cultivables afin de survivre.
« Malheureusement, la dégradation généralisée de l’environnement naturel du pays est assortie de politiques de développement qui tendent à perpétuer le système d’extraction hérité de l’époque coloniale et des régimes ayant suivi l’indépendance », a déclaré Mme Andriamanantenasoa.
« Ces politiques sont particulièrement axées sur la promotion des secteurs extractif et agro-industriel, ainsi que sur le développement de l’économie bleue et la création de zones économiques spéciales dédiées aux investisseurs étrangers. Ces stratégies de développement se caractérisent donc par leur forte empreinte écologique et l’exploitation illégale des terres, ce qui cause un problème récurrent d’accaparement des terres. »
Le Forum organisé par le HCDH et le CRAAD-IO s’est terminé par l’adoption de la Déclaration d’Antananarivo pour la justice climatique, élaborée par les jeunes du mouvement social malgache pour la justice climatique afin d’alerter les autorités nationales sur les questions de droits économiques, sociaux et culturels liées aux changements climatiques. Ils espèrent également que la Déclaration permettra d’appuyer leur plaidoyer auprès du Gouvernement pour qu’il promeuve et intègre l’éducation à l’environnement dans les établissements scolaires, qu’il mette en place un « Fonds vert pour le climat » et qu’il garantisse l’accès des jeunes à ce fonds, qu’il modifie le code pénal malgache pour y introduire des délits environnementaux, qu’il rende opérationnel un tribunal vert et qu’il ratifie le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
Durant la COP21 à Paris en 2015, les pays développés ont été appelés à renforcer leur soutien pour mobiliser 100 milliards USD par an d’ici 2020 pour l’action climatique dans les pays en développement.
« À la COP, nous demandons aux grands pays du monde du Nord de payer leur dette historique, écologique et climatique à Madagascar. Ils se sont engagés à faire tellement de choses, il est temps à présent de compenser les pertes et les dommages irréversibles causés par leurs actions », a-t-elle déclaré.
« Ils doivent essayer de réparer, si cela est encore possible, les dommages qu’ils ont causés et tenter de mettre en place des mesures d’adaptation et d’atténuation en consultation avec les communautés locales », a-t-elle ajouté. « Jusqu’à présent, les décisions sur la compensation des émissions de carbone ont été prises dans les hautes sphères, mais l’argent n’est pas parvenu aux communautés locales. Nous avons besoin de programmes concrets sur le climat et de mesures concrètes ayant un impact concret sur la population. »