Madagascar et les nouvelles frontières des zones de sacrifice

Madagascar et les nouvelles frontières des zones de sacrifice

 Madagascar, un ensemble d’îles au large de la côte est de l’Afrique, fait partie des pays les plus touchés par le changement climatique. Ce pays riche en ressources naturelles est également confronté à la pauvreté, à la dette, à l’effondrement des systèmes de santé, aux conséquences de la pandémie de COVID-19 et à une myriade d’autres problèmes. Le redressement économique du pays dépend de la transition vers une énergie plus propre, mais si et seulement si son modèle de développement réduit efficacement les risques environnementaux, climatiques et de catastrophes naturelles, et fournit des avantages sociaux et économiques aux groupes vulnérables qui constituent 80 % de la population.

L’Agence Internationale de l’Energie estime que d’ici 2040, les énergies renouvelables telles que l’énergie éolienne et solaire représenteront 82 % de la demande totale en métaux et en minerais. Une autre partie importante des métaux sera consacrée au remplacement des voitures à essence par des voitures électriques (qui nécessitent six fois plus de métaux et de minerais) et à la décarbonisation globale du secteur des transports. Selon la Banque Mondiale, plus de trois (3) milliards de tonnes de métaux et de minerais – y compris les terres rares, le cobalt, le graphite, le nickel, le cuivre et le lithium – seront nécessaires au cours des 30 prochaines années pour alimenter les technologies liées à la transition énergétique.

La richesse de Madagascar en minerais et métaux essentiels à la transition énergétique place la Grande île dans une position particulièrement délicate. Face à une demande mondiale croissante, les entreprises des pays riches se sont précipitées pour s’approprier ces métaux et ces minerais, en particulier les terres rares dont Madagascar a été richement doté par la nature. Le pays manque cruellement des capacités requises pour valoriser ces minerais critiques et négocier des contrats rentables avec les multinationales qui dominent les industries extractives.

Madagascar est devenu une « zone de sacrifice » où la vie des habitants risque d’être « sacrifiée » pour que les pays riches puissent réussir leur propre transition énergétique. Ce que la géographe Julie Klinger appelle les « frontières des terres rares » sont situées dans des endroits où les vies et les paysages locaux sont considérés comme pouvant être sacrifiés au nom du bien commun: 

Ces endroits où les entreprises toxiques et leurs effets nocifs finissent par atterrir sont appelés « zones de sacrifice », car leur destruction est considérée comme indispensable pour atteindre le bien commun. C’est dans les zones de sacrifice que se situent les externalités dites négatives. Elles ne sont pas éphémères ou intangibles : elles ont une géographie spécifique qui peut être cartographiée. La destruction de paysages et de vies dans les mines de terres rares a généralement été considérée comme un juste prix à payer, en général par ceux qui ne vivent pas dans la zone de sacrifice.

Comme l’a souligné un analyste de la transition énergétique de l’Union Européenne (UE), « quelque part, il y a toujours quelqu’un qui sacrifie quelque chose, et pour l’instant, cette question n’est pas ouvertement débattue dans l’UE. En refusant de construire les nouvelles mines nécessaires à la transition verte elle-même, l’Europe ne fait que reporter ces effets secondaires néfastes sur les pays en développement. »

Comment Madagascar peut-il tirer profit de ses ressources naturelles tout en minimisant les risques pour l’environnement et sans forçer sa population à vivre dans une zone de sacrifice ?

 La diversité de Madagascar

Le projet d’exploitation des terres rares dans la péninsule d’Ampasindava à Madagascar n’a pas encore atteint le stade de l’extraction et du traitement de ces métaux. Cela est dû en grande partie au mouvement de résistance des communautés locales contre le projet afin de préserver leurs moyens de subsistance et leur patrimoine écologique et culturel.

La majorité des personnes affectées par le projet de terres rares vivent sur la péninsule d’Ampasindava, également connue sous le nom de Tanibe Andrefa ou « Grande terre à l’ouest » par les Sakalava, le groupe ethnique majoritaire qui y vit. La péninsule compte environ 33 000 habitants répartis dans 27 villages et quatre communes rurales. Elle bénéficie d’un microclimat qui a permis la production de cultures d’exportation à haute valeur ajoutée : le cacao, la vanille, le poivre et le café. Grâce à son littoral découpé, riche à la fois de récifs coralliens et d’immenses mangroves, sa biodiversité marine exceptionnelle fait vivre de nombreux ménages grâce aux activités de pêche traditionnelles.

La péninsule d’Ampasindava a été officiellement désignée comme aire protégée en 2015 sur une superficie de 900 kilomètres carrés, à l’exception de la concession minière du projet d’exploitation de terres rares. 80 % des plantes de Madagascar sont endémiques au pays, et 8 % n’existent que sur la péninsule. Au moins huit espèces de lémuriens vivent sur la péninsule, et six sont endémiques au nord-ouest de Madagascar. Six d’entre elles sont répertoriées comme étant en danger par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), et les deux autres sont vulnérables. L’écorégion, qui comprend le deuxième récif corallien le plus diversifié au monde, est l’un des derniers sanctuaires au niveau régional pour le dugong et la baleine bleue, deux espèces en danger critique d’extinction selon l’UICN. De plus, les plages de l’île de Nosy Iranja, au large de la péninsule, sont l’un des sites de nidification les plus importants pour les tortues vertes et les tortues imbriquées de Madagascar. Les mangroves, quant à elles, jouent un rôle crucial dans le maintien des pêcheries qui fournissent de la nourriture et des revenus à la population locale, protègent les villages des cyclones et aident à lutter contre le changement climatique en stockant d’importantes quantités de carbone.

Au fil des siècles, une identité culturelle s’est construite sur la péninsule d’Ampasindava, au carrefour des routes maritimes de l’océan Indien. La baie d’Ampasindava abrite les vestiges d’une des plus anciennes cités malgaches, Mahilaka, qui était un comptoir swahili. Aujourd’hui, des cultes et des rituels dédiés aux esprits et aux ancêtres sont encore pratiqués sur la presqu’île d’Ampasindava, dans des lieux préservés par les communautés locales en tant que sites sacrés animistes ou cimetières. Il existe également de nombreux autres sites archéologiques dans la région, tels que les îles d’Ambariotelo et de Marodoka sur Nosy Be, qui font partie de ce que l’on appelle les « Anciennes Echelles du Commerce » dans le nord de Madagascar, un réseau commercial et culturel qui relie la région aux Comores, à Zanzibar et à l’Afrique de l’Est.

Madagascar et les terres rares

Le début de l’exploration des terres rares dans la péninsule d’Ampasindava remonte à la fin du XIXe siècle, avec des études menées pendant la colonisation par des géologues français qui ont noté la présence d’une roche granitique particulière et étudié les propriétés minéralogiques de cette roche appelée fasibitikite dans la langue locale, notamment sa composition en niobium-tantale-zirconium qui a été documentée en 1922.

De 1988 à 1991, la mission géologique soviétique a exploré le potentiel de la zone en partenariat avec l’Office militaire national des industries stratégiques (OMNIS). Le 18 avril 2003, Calibra Resources and Engineers a obtenu une licence d’exploration pour la concession d’Ampasindava, qui a été transférée en janvier 2008 à Zebu Metals, qui a poursuivi les études d’évaluation du potentiel minier de la concession.

En février 2009, un coup d’État a renversé le Président élu Marc Ravalomanana pendant son second mandat. Andry Rajoelina est devenu le Président de la Haute Autorité de Transition, qui a gouverné le pays jusqu’en 2013, et a accordé en octobre 2009 à Tantalum Rare Earth Malagasy (TREM) le permis d’exploration pour la concession d’Ampasindava, qui consiste en 48 blocs miniers d’une superficie totale de 300 kilomètres carrés. TREM étant enregistrée à l’île Maurice en tant que société offshore, elle est virtuellement exonérée d’impôts à Madagascar en vertu de l’accord fiscal bilatéral entre l’île Maurice et Madagascar. 

Ampasindava est considéré comme l’un des gisements de terres rares les plus prometteurs en dehors de la Chine depuis décembre 2011, suite à une estimation de ses ressources minérales à 104 000 tonnes d’oxydes de terres rares (OTR). Ces gisements se trouvent principalement dans la couche de sol recouvrant la roche mère, ce qui facilite grandement leur extraction. En octobre 2014, SGS Canada Inc. a réestimé les ressources minérales d’Ampasindava à 562 000 tonnes d’oxydes de terres rares, pauvres en éléments radioactifs et riches en terres rares lourdes, les plus chères et les plus « critiques ».

Le permis d’exploration de TREM avait été renouvelé en janvier 2015 pour trois ans. Malgré la nature douteuse de son permis d’exploitation – délivré par le régime transitoire, qui n’est pas habilité à prendre des engagements à long terme au nom du pays -, la société a commencé ses opérations de recherche en forant des milliers de puits de forage dans l’ensemble de sa concession minière. Elle prévoyait de mener un essai minier pilote et de construire une usine dans le village de Betaimboay, très proche du bord de mer, tout en poursuivant ses activités d’exploration dans d’autres zones d’Ampasindava.

L’incapacité de TREM à réhabiliter de nombreux puits de sondage et les plaintes des paysans concernant ses opérations de recherche menées sans leur accord préalable ont conduit à la mobilisation d’une grande partie des communautés voisines du projet d’exploitation des terres rares par une organisation paysanne locale. Plusieurs ONG travaillant dans le domaine de l’environnement se sont ensuite jointes à l’effort. La première déclaration d’opposition au projet d’exploitation des terres rares a été faite en 2016, et a été présentée aux Parlementaires. La direction de TREM a réagi en envoyant une lettre au Ministre des Mines pour se plaindre de diffamation de la part de la société civile.

Cette même année, l’Office national de l’environnement (ONE) a autorisé TREM à commanditer une étude d’impact environnemental de ses plans de production pilote à Ampasindava. Bien que la production pilote ne puisse commencer avant l’approbation de cette étude, aucune étude n’a été soumise à l’ONE pour approbation. Le permis d’exploration de TREM a expiré en janvier 2017, et la société n’a pas prélevé d’échantillons depuis lors, bien qu’elle dispose toujours de deux enclos surveillés et d’une autre zone clôturée à Ampasindava.

TREM a également connu plusieurs changements de propriétaires. En 2016, la majorité des actions a été cédée à une société basée à Singapour, ISR Capital. Puis, en 2020, le contrôle est revenu à une société basée à Maurice, Reenova Rare Earth Malagasy (RREM). Confrontée à une forte opposition de la part des communautés affectées, RREM a tenté de relancer ses activités. Mais à la mi-2022, son Président est décédé et deux cadres supérieurs ont démissionné, déclarant que la société n’était plus en mesure de fonctionner en tant qu’entité. Le projet RREM est actuellement en suspens et ses bureaux locaux sont fermés.

L’impact des projets d’exploitation de terres rares[1]

Lors de réunions publiques début février 2015, TREM a annoncé que des milliers de forages exploratoires avaient permis de découvrir que le gisement de la région d’Ampasindava contenait des oxydes de terres rares à une concentration de 0,08 %, notamment du praséodyme, du néodyme, du terbium et du dysprosium. Selon la société, les argiles ioniques de Madagascar, dont 20 % semblent être des terres rares lourdes, les plus recherchées et les plus difficiles à produire, sont similaires à celles extraites dans le sud de la Chine.

Il est donc probable que l’extraction soit également similaire, par lixiviation sur site. Dans sa lettre de 2016 aux autorités du Ministère des Mines, TREM a expliqué la méthodologie : des fosses seraient creusées pour être remplies de lixiviant, à savoir du sulfate d’ammonium dilué dans de l’eau claire. La pulpe – l’eau contenant le sulfate de terres rares – serait recueillie par des tunnels sub-horizontaux. Une fois les terres rares retirées du sol, le site serait soumis à un lavage à haute pression afin d’éliminer tout produit chimique résiduel et d’assainir les eaux souterraines avant la fermeture des puits de tunnel.

La Chine, qui détient le monopole de la production mondiale de terres rares, a recours à la technologie de lixiviation sur site depuis juin 2011 afin de rompre avec deux décennies de filtration d’argiles en surface à base de sulfate d’ammonium, qui ont entraîné une grave dégradation de l’environnement et des effets néfastes sur la santé des travailleurs et des communautés avoisinantes. Bien qu’elle soit considérée comme moins nocive, la méthode de lixiviation sur site est controversée car ses impacts environnementaux sont loin d’être négligeables. Elle n’évite pas complètement la destruction du couvert végétal, tout en entraînant nécessairement une pollution du sol, et potentiellement celle des eaux souterraines.

Pour obtenir une tonne de terres rares, il faut traiter environ 1 300 tonnes de terre argileuse. L’entreprise prévoit de produire 10 000 tonnes de minerai de terres rares par an pendant au moins 40 ans, ce qui se traduit par le traitement de la quantité astronomique de 520 millions de tonnes de terre argileuse. Ces travaux affecteront 7 000 hectares, dont un tiers devrait se retrouver avec sa végétation complètement détruite et la couche supérieure du sol enlevée. Environ 2 200 hectares de couverture végétale naturelle, de rizières, de plantations de cultures commerciales et de zones nécessaires à la subsistance des communautés riveraines seront détruits. En outre, la déforestation massive devrait réduire considérablement l’aire de répartition du lémurien sportif de Mittermeier, l’un des lémuriens menacés d’extinction que l’on ne trouve que sur la péninsule d’Ampasindava.

Selon The Guardian, « la production d’une tonne de terres rares génère 1 000 tonnes d’eau contaminée par du sulfate d’ammonium et des métaux lourds, et 2 000 tonnes de déchets toxiques ». TREM prévoyait d’exporter 10 000 tonnes de terres rares par an pendant plus de 40 ans, de sorte que la production de déchets serait estimée à 400 millions de tonnes d’eau contaminée et à 800 millions de tonnes de déchets toxiques au cours du cycle de vie de la mine. Pour éviter toute contamination, TREM devrait stocker les boues argileuses dans des compartiments totalement étanches, suffisamment solides pour résister aux fortes pluies et aux intempéries. Le nord de Madagascar connaît des précipitations de plus de 2 000 millimètres par an. Le risque de fuites ou de débordements des sites de stockage est donc élevé, ce qui entraînerait une modification de l’acidité et de l’envasement des cours d’eau avoisinants.

La topographie et l’hydrographie de la péninsule augmentent le risque de contamination, car les rivières et les eaux de ruissellement s’écoulent des montagnes vers la mer en traversant la péninsule, ses vallées, ses forêts, ses cultures et ses mangroves. En cas de cyclone, une mauvaise gestion du stockage des boues argileuses peut conduire à une catastrophe sans précédent pour l’ensemble de la zone côtière, sa biodiversité et les ressources dont dépend la survie de ses communautés. L’acidification des eaux côtières serait fatale aux récifs coralliens.

La lixiviation sur site utilise de grandes quantités d’eau et n’est pas « hydrogéologiquement contrôlable », ce qui implique un risque élevé de contamination des eaux souterraines et de surface car le milieu dans lequel circule la solution de lixiviation n’est pas confiné. La pollution de l’eau qui en résulte, due à l’augmentation du pH, de la conductivité électrique, du total des solides dissous, des sulfates et d’autres polluants, entraîne une perturbation des équilibres ioniques et une diminution de la biodiversité. La pollution des rivières et des réservoirs en aval par les sulfates persiste longtemps après l’arrêt de l’exploitation minière en raison de l’augmentation de la production microbienne de sulfate d’hydrogène, une substance extrêmement toxique pour de nombreux organismes et plantes aquatiques.

Les différentes étapes du processus industriel d’extraction et de concentration des terres rares impliquent la production de « grandes quantités de résidus toxiques, sous forme d’émissions gazeuses, de poussières, d’eaux usées et de déchets solides, contenant notamment des fluorures, des sulfures, des acides et des métaux lourds ». On estime que 6 à 7 tonnes de sulfate d’ammonium et 1,2 à 1,5 tonne d’acide oxalique sont nécessaires pour produire une tonne d’oxydes de terres rares.

Par ailleurs, le risque radioactif lors de l’extraction et de la concentration des terres rares ne peut être négligé, même si la société TREM a affirmé l’existence de faibles niveaux de radioactivité ainsi qu’une présence minime de thorium et d’uranium dans les minerais qu’elle explore. En effet, comme le souligne Julie Klinger, « toutes les terres rares peuvent provoquer des lésions organiques en cas d’inhalation ou d’ingestion ; plusieurs corrodent la peau ; et cinq d’entre elles – le chrome, le gadolinium, le terbium, le thulium et l’holmium – sont si toxiques qu’elles doivent être manipulées avec une extrême précaution pour éviter l’empoisonnement par radiation ou la combustion. En outre, les terres rares ont tendance à coïncider avec le thorium et l’uranium radioactifs, ce qui signifie que l’extraction des terres rares crée également des déchets radioactifs qui doivent être traités ».

Les incidences environnementales du projet d’exploitation des terres rares risquent fort de se traduire par des coûts sociaux et économiques réels qui seront assumés principalement par les femmes et leurs communautés. En particulier, les agriculteurs tirent leurs revenus de la culture du riz et de cultures commerciales telles que la vanille, le poivre, le café et le cacao. Si l’extraction des terres rares devait se poursuivre, les agriculteurs subiraient une perte de revenus considérable. La pollution de l’eau réduirait les prises des pêcheurs, dont les prises quotidiennes ont déjà chuté de 50 à 60 % entre 2019 et 2022.

En outre, l’érosion du niveau de vie et la perte de revenus pour les femmes et leurs familles signifieraient que beaucoup de leurs enfants, en particulier les filles, ne pourraient plus aller à l’école, comme le montrent les résultats des recherches sur le terrain[2] dans les zones côtières de la péninsule d’Ampasindava. Cela aurait clairement un impact intergénérationnel préjudiciable à long terme sur leurs perspectives en matière d’éducation et d’emploi.

L’impact sur le développement du secteur touristique serait particulièrement désastreux, étant donné qu’il constitue le principal moyen de subsistance de la grande majorité de la population de Nosy Be, Sakatia et des autres îles bordant la péninsule.

Quelles alternatives pour Madagascar ?

Madagascar a longtemps souffert de la « malédiction des ressources ». L’exploitation des ressources naturelles du pays a permis de perpétuer le comportement rentier et l’autoritarisme du gouvernement, ainsi que la pauvreté des populations locales et les inégalités à l’intérieur du pays. L’histoire du pays regorge d’exemples de dirigeants nationaux incapables d’exploiter les ressources naturelles pour améliorer le niveau de vie des générations actuelles et à venir. Les causes profondes de cette malédiction des ressources comprennent la mauvaise gestion publique des revenus des ressources naturelles, et des institutions faibles, inefficaces, instables et corrompues. La volatilité des revenus des ressources naturelles due aux fluctuations des prix mondiaux des matières premières est également une cause de nature plus cyclique.

De manière générale, les décideurs politiques doivent reconsidérer le rôle et la place des industries extractives dans le développement économique du pays à la lumière des impacts des politiques néolibérales et extractivistes qui ont conduit à la crise multidimensionnelle que traverse le pays. La protection des biens publics communs – terre, air, eau – doit être assurée face à la crise climatique et à la course mondiale aux minerais stratégiques.

L’exploitation des ressources minières doit être basée sur les priorités locales et régionales avec le consentement libre, informé, préalable et continu des communautés concernées. Elle doit privilégier l’extraction à petite échelle et à faible impact, sous des formes collectives de propriété et de contrôle.

La transition énergétique de Madagascar doit assurer la souveraineté énergétique à travers des formes collectives, décentralisées et durables d’énergie renouvelable sous le contrôle démocratique des communautés, et la réduction progressive de l’exploitation des énergies fossiles dans les limites imposées par les objectifs nationaux définis par l’Accord de Paris sur le changement climatique.

La transition de Madagascar vers les énergies propres doit respecter les normes internationales en matière de travail, de santé, de sécurité et de droits humains, en particulier les droits des femmes et la protection sociale des groupes vulnérables. La transition écosociale globale doit également exploiter les dividendes de la jeunesse malgache, étant donné que les taux élevés de chômage des jeunes dans le pays créent un terrain fertile pour l’insécurité, les conflits et les autres maux sociaux.

[1] Cette section est basée sur de larges extraits du Communiqué publié par le Collectif TANY et le CRAAD-OI le 25 août 2016, intitulé « L’EXPLOITATION DES TERRES RARES A AMPASINDAVA EST UN PIEGE DANGEREUX POUR MADAGASCAR ».

[2] CRAAD-OI, 2022. Analyse prospective écoféministe des coûts du projet d’exploitation des terres rares dans la péninsule d’Ampasindava, Madagascar.