POUR QUI TRAVAILLENT LES AUTORITES ETATIQUES ET LES ÉLUS DE MADAGASCAR ?

POUR QUI TRAVAILLENT LES AUTORITES ETATIQUES ET LES ELUS DE MADAGASCAR ?

Avec l’adoption à la quasi-unanimité des Parlementaires Malagasy présents aux assemblées plénières des différentes lois récemment révisées – à l’instar de la Loi sur les investissements, du Code Minier, ainsi que des deux dernières lois sur les propriétés privées non titrées (PPNT) – dans lesquelles le respect et la protection des droits des communautés ont été délibérément ignorés malgré les alertes lancées par la société civile, toutes les conditions sont réunies pour laisser libre cours à la violation des droits des communautés locales Malagasy et pour les dépouiller de leurs terres et de leurs moyens d’existence.

Désormais, il apparaît clairement que le bien-être et les droits du peuple Malagasy ne font aucunement partie des priorités de l’Etat, mais qu’ils sont constamment sacrifiés pour des ambitions politiques et des intérêts privés, et ce avec la bénédiction des élus qui sont censés défendre les intérêts et les droits des communautés locales.

En effet, nous faisons actuellement face à une vague, qui était tellement prévisible face au contenu controversé de ces nouvelles lois qu’elle semble calculée, de cas d’accaparement de terres résultant de la mise en place de grands projets dont certains sont qualifiés de « projets présidentiels », et par conséquent, d’expulsions et expropriations forcées d’un nombre croissant de communautés locales Malagasy. De surcroît, force est de constater que ni les droits procéduraux des communautés affectées, ni les règles applicables dans ce genre de situation n’ont été respectés. Dans la plupart des cas suivants cités à titre d’exemples, il y a eu une soi-disant « consultation publique » à la va vite n’impliquant que quelques personnes, tandis qu’aucun affichage ni information conséquente concernant les différents projets n’ont été fournis, si bien que les communautés concernées sont obligées d’aller rechercher de telles informations par leurs propres moyens, se heurtant la plupart du temps au refus des responsables étatiques de communiquer les informations nécessaires.

  • Les communautés de l’île de Sakatia dans le district de Nosy Be, dont les ancêtres ont occupé les terres de cette île depuis plus de cent ans, viennent d’être informées que le projet hôtelier de la société GREEN MADALAND auquel elles se sont opposées depuis plusieurs années, vient d’obtenir un bail emphytéotique de 99 ans et d’être désigné « projet présidentiel », et que ces communautés devraient s’attendre à « être déplacées ailleurs » très prochainement.
  • Les communautés d’Andraingina dans le district de Moramanga, viennent d’apprendre que les terres qu’elles cultivent pour leur subsistance depuis des décennies, vont accueillir un autre projet présidentiel sous la forme d’un parc solaire. Ces communautés vont donc devoir être expulsées pour que le Velirano N°02 du Président de la République dont ce projet ferait partie puisse être réalisé, selon les responsables interrogés.
  • Le projet d’extraction de terres rares à Ampasindava, dans le district d’Ambanja, vient également d’être racheté par la société australienne HARENA qui a déposé une demande de conversion de son permis de recherche et qui s’apprête donc à rouvrir le site minier malgré l’opposition constante des communautés affectées, ainsi que les interpellations incessantes de la société civile au sujet des impacts désastreux de ce projet sur les écosystèmes et les droits fondamentaux des populations riveraines. Il est évident que l’octroi d’un permis d’exploitation à ce projet, sous couvert du nouveau Code Minier et de la nouvelle Loi sur les Investissements, va cautionner les nombreuses violations prévisibles des droits humains des communautés locales qui se verraient complètement abandonnées par l’Etat, alors qu’il est de son devoir de les protéger contre ce genre d’injustice.
  • Le projet Base Toliara, qui a été suspendu par décision du Conseil des Ministres en 2019, semble actuellement mener ses opérations en toute liberté et en toute impunité selon les communautés concernées, sans qu’aucune mesure officielle levant la suspension de ses activités n’ait été publiée par le gouvernement Malagasy, provoquant conflits et violences au sein de ces communautés. Outre ses impacts environnementaux et sociaux dévastateurs et irréversibles dénoncés à maintes reprises par lesdites communautés, la réouverture de ce projet les expose également à la perte de leurs terres et de leurs moyens de subsistance, ainsi qu’à la violation d’un large éventail de leurs droits fondamentaux.
  • Sans oublier la construction de l’autoroute sur l’axe Antananarivo – Toamasina pour laquelle la procédure de consultation publique a failli être occultée, puis a finalement été organisée avec précipitation, faisant clairement fi des droits de milliers de citoyens Malagasy qui, de toute évidence, n’auront aucunement le droit de ne pas consentir à ce « projet présidentiel », mais qui vont le payer avec la perte de leurs terres, de leurs moyens de subsistance, ainsi que de leurs foyers et cadres de vie.

    Pour les signataires de ce Communiqué, il est inacceptable que l’Etat ait non seulement failli à son obligation de respecter et de protéger les droits du peuple Malagasy, mais aussi qu’il se rende lui-même coupable de violations des droits fondamentaux des communautés affectées, et qu’il contribue à exacerber les injustices sociales, économiques et environnementales déjà intolérables, surtout pour les paysans qui constituent l’écrasante majorité au sein de ces communautés.

    Nous rappelons à Monsieur le Président de la République qu’il a prêté serment de tout mettre en œuvre afin de respecter et de protéger les droits humains de tous les Malagasy sans discrimination aucune, et de toujours s’efforcer d’assurer le bien-être de la population Malagasy, ainsi que de respecter scrupuleusement la Constitution et les lois qui régissent la Nation.

    Nous rappelons également à l’ensemble des autorités étatiques et des élus Malagasy que les droits humains constituent l’un des piliers du respect de l’Etat de Droit, sans lequel ni le développement social et économique, ni la stabilité politique de Madagascar ne sauraient être assurés.

    Antananarivo le 05 juin 2023

    Organisations signataires :

  • Centre de Recherches et d’Appui pour les Alternatives de Développement – Océan Indien (CRAAD-OI) craad.madagascar@gmail.com ; https://craadoimada.com
  • Collectif pour la défense des terres malgaches – TANY patrimoine.malgache@yahoo.fr ; http://terresmalgaches.info
  • Femmes en Action Rurale de Madagascar (FARM)

    FARM Madagascar

  • Réseau des Jeunes pour le Développement Durable (RJDD)

    Réseau des Jeunes pour le Développement Durable

  • Mouvement Chrétien de Cadres et de Professionnels (MCCP)- PAX ROMANA mccp.national@gmail.com
  • Fikambananan’ny Malagasy Mitady Amin’ny Fanandevozana Moderina (AVOTRA)
  • VIE NEUVE MADAGASCAR
    vieneuvemada@gmail.com
  • Collectif Régional des Organisations des Personnes Handicapées d’Atsimo-Andrefana ( CROPH-AA)
    fprielson@gmail.com