Madagascar : la double peine face aux dérèglements climatiques

Madagascar : la double peine face aux dérèglements climatiques

Malgré des ressources naturelles considérables, la cinquième plus grande île du monde fait face à une insécurité alimentaire croissante. En cause : les dérèglements climatiques, mais aussi l’exploitation intensive de ressources locales par des sociétés étrangères. Pour inverser la tendance, des structures se mobilisent localement et en France, soutenues par le CCFD-Terre Solidaire, première ONG française de solidarité internationale et de développement.

Les dérèglements climatiques sont devenus une cause majeure de la faim dans le monde. La multiplication des phénomènes climatiques extrêmes (cyclones, inondations, sécheresses…) détruit les écosystèmes, aggravant ainsi l’insécurité alimentaire qui touchait plus de 828 millions de personnes en 2022. Cas emblématique de ce lien entre crise climatique et insécurité alimentaire : Madagascar. Cette île de 30 millions d’habitants, située dans l’océan Indien, fait face à une alternance de sécheresses et d’inondations. En 2022, cinq cyclones ont ainsi frappé l’île, causant notamment d’importants dégâts sur les terres agricoles. Sachant que plus de 80% des Malgaches vivent de l’agriculture, l’impact de ces phénomènes climatiques est considérable. 

Le fléau de l’extractivisme est une réalité pour Madagascar, mais aussi pour son pays
voisin, l’Afrique du Sud, où les activités minières font des ravages humains et environnementaux.
© Laurent Hazgui/CCFD-Terre Solidaire

À cela s’ajoute une deuxième menace pour la sécurité alimentaire de l’île : l’extractivisme. Il peut être défini comme « l’exploitation massive des ressources naturelles d’un territoire par des moyens industriels intensifs ». Dans le cas de Madagascar, des entreprises étrangères extraient du sol du cobalt, du nickel et surtout des terres rares, ces métaux stratégiques qui servent aux batteries des véhicules électriques. Cette activité est polluante et surtout néfaste pour les systèmes alimentaires, car elle se développe sur des terres cultivées ou cultivables, causant l’expropriation des paysans impactés. Ces derniers sont alors relocalisés sur des parcelles beaucoup moins fertiles, ce qui fragilise leur autonomie alimentaire.

Une mobilisation locale de plus en plus forte 

Face à cette « double peine », des structures locales se mobilisent. Parmi elles : le CRAAD-OI (Centre de recherches et d’appui pour les alternatives de développement – océan Indien). Cette association fait la promotion de solutions de développement durable basées sur les principes d’égalité de genre et de justice sociale, économique et écologique. Le CRAAD-OI mène un travail de plaidoyer auprès des politiques locaux et sensibilise également la population pour qu’elle refuse le modèle de l’extractivisme. « La population ne profite pas de la présence de ces entreprises étrangères. Je trouve injuste que les pays du Sud soient toujours victimes du développement des pays du Nord », explique Mamina Rakotondravao, activiste du CRAAD-OI. « Il faut que l’on entende nos voix pour que ça bouge ! Sinon, rien ne changera ! », martèle pour sa part Volahery Andriamanantenasoa, directrice des programmes au sein du CRAAD-OI. 

Le CCFD-Terre Solidaire soutient le CRAAD-OI de multiples manières : institutionnelle, technique, financière, via des plaidoyers communs ou encore en donnant de la visibilité à ses actions. « Le CRAAD-OI a réussi à stopper plusieurs projets extractifs, notamment autour des terres rares du nord de l’île, et grâce à leurs actions, des leaders locaux émergent, explique Jéromine Chaumard, chargée de mission partenariat Afrique au CCFD-Terre Solidaire. Nous partageons leur combat social, économique et politique autour de la justice climatique. La situation de cette île fait écho à ce qui se passe partout dans le monde. La justice climatique, ainsi que l’insécurité alimentaire, sont des enjeux globaux qui nous concernent tous. » 

Le CCFD-Terre Solidaire est la première ONG française de solidarité internationale et de développement. Elle agit depuis plus de 60 ans aux côtés des populations les plus vulnérables contre toutes les formes d’injustice, et en premier lieu, celle de souffrir de la faim. Car régler le problème de la faim est un préalable à la résolution de toutes les autres injustices, telles que l’accès difficile à l’éducation, à la santé, la pauvreté… Loin des pratiques d’assistance et d’urgence, son action passe par le soutien, notamment financier, à des associations partenaires locales. « Nous ne faisons jamais « à la place de » mais « avec eux » », résume l’ONG. En 2022, le CCFD-Terre Solidaire a soutenu 621 projets dans 72 pays, via 525 organisations locales. En France, l’ONG est portée par 7 500 bénévoles