Conférence PMA5

Conférence PMA5 - Table ronde thématique de haut niveau 3 : « La transformation structurelle comme moteur de la prospérité dans les PMA »

Zo Randriamaro

Coordinatrice, Centre de Recherches et d’Appui aux Alternatives de Développement – Océan Indien

Excellences,

Participants distingués à cette table Ronde Thématique,

J’ai l’honneur et le privilège de discuter avec vous des déterminants essentiels pour une intégration réellement transformative des pays africains dans les chaînes de valeurs régionales et mondiales. 

A cet égard, je voudrais attirer votre attention sur deux (2) impératifs qui me semblent incontournables en vue d’une transformation structurelle des économies des pays africains.

1) L’urgence d’un nouveau modèle alternatif de développement véritablement inclusif et durable

La transformation structurelle des PMA n’est pas un simple processus technocratique et ne doit pas être dépolitisée, comme les débats autour du Programme d’Action de Doha ont tendance à le faire. Nous ne pouvons pas faire l’économie d’une rupture avec le modèle de développement néolibéral qui nous a conduit à la crise multidimensionnelle actuelle. Comme l’a si bien dit un grand prospectiviste Africain, le Prof. Alioune Sall , « le passé des autres ne doit pas servir d’avenir à l’Afrique ».

Les PMA doivent tracer de nouvelles voies vers un modèle de croissance endogène basé sur le développement du potentiel agricole de l’Afrique, non seulement pour s’assurer que la grande majorité de sa population vivant en milieu rural bénéficiera réellement du modèle de croissance, mais aussi parce qu’elle peut nourrir le monde si on lui en donne effectivement les moyens.

Nous devons tirer des leçons de la crise du COVID-19 et des conséquences de la guerre en Ukraine, et briser les chaînes de la dépendance à l’égard des importations des biens essentiels, en insérant des chaînes de production et de commercialisation en circuit court dans nos modèles alternatifs de développement africains.

Dans cette perspective, nous devons traiter et transformer nos matières premières localement, afin de générer ainsi une croissance inclusive en créant de la valeur, des connaissances, des compétences, et des emplois pour les 40 millions de jeunes Africains qui arriveront sur le marché du travail dans les prochaines années.

Les facteurs écologiques doivent être pris en compte de manière adéquate dans ces modèles de développement alternatifs, en repensant les politiques d’aménagement du territoire en fonction des impacts déterminants du changement climatique sur la vie des populations africaines, et en empêchant les pratiques prédatrices et destructrices du patrimoine naturel des acteurs externes et internes.

2)  L’impératif d’équité : passer du libre-échange au commerce équitable

Ainsi, des mesures urgentes doivent être prises pour protéger les biens communs de l’Afrique – notamment les terres, les forêts, et l’eau – contre les projets de développement extractivistes et les nouvelles formes d’impérialisme camouflées derrière les habits verts de la lutte contre la crise climatique.

En outre, une transformation radicale du système commercial international et de son cadre règlementaire s’impose, car ceux-ci doivent cesser de reproduire le schéma colonial d’insertion primaire des pays africains dans le commerce mondial.

En particulier, il importe de résoudre le problème des chaînes de valeur mondiales, qui ne peuvent plus constituer des chaînes de dépendance pour l’Afrique, et qui nécessitent une restructuration des relations commerciales inéquitables avec les pays développés, dans le cadre d’un partenariat mondial renouvelé et plus inclusif.

Au niveau des chaînes de valeurs régionales, l’établissement de la ZLECA n’est pas un exercice gagnant-gagnant pour tous les pays participants, étant donné les inégalités flagrantes entre eux en termes de capacités de production et de niveaux de développement.

Pour que ce processus contribue effectivement à la transformation structurelle des économies africaines à travers l’intégration régionale, la solidarité entre les pays africains développés et pauvres ne doit pas rester une figure de rhétorique, mais doit devenir un principe de fonctionnement, ainsi que la démocratisation du système de régulation du commerce dans lequel les communautés économiques régionales doivent jouer un rôle plus important.

Au niveau national, la défense de l’intérêt général doit être l’objectif principal du système de gouvernance et de régulation du commerce, conformément à la logique relationnelle qui prédomine dans les sociétés africaines.

En conclusion, il appartiendra au PMA africains eux-mêmes de construire leur propre vision de leur mode d’intégration dans l’économie mondiale, ainsi qu’un modèle de développement et un système de gouvernance adéquats pour réaliser cette vision.

MERCI POUR VOTRE ATTENTION !